Critique de « Le Petit Prince » par E-Stark
« On ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux. »Antoine de Saint-Exupéry – Le Petit Prince (1943)
Difficile d’adapter un roman comme Le Petit Prince, d’autant plus quand il s’agit de le porter à l’écran pour un public majoritairement composé d’enfants. Car une chose est sûre avec cette histoire c’est qu’elle possède plusieurs niveaux de lectures difficilement abordables par les plus jeunes.
Si dans la forme Mark Osborne capte avec brio l’essence de l’histoire écrite par Saint-Exupéry, il peine en revanche avec le fond à captiver les plus petits (la preuve constatée en salle). Néanmoins il est difficile de bouder le film pour cela, tant il s’avère généreux et tendre, tout en abordant les thématiques clés de cette histoire.
La richesse première du Petit Prince réside dans la fluidité du montage de Mark Osborne, qui alterne avec justesse les scènes narratives et les scènes vécues par les personnages. Là où le récit aurait pu tout bêtement s’en tenir à ne raconter que l’histoire originale par l’aviateur, le film nous place dans le regard de la petite fille. Toute la portée poétique et humaine du récit trouve sa place grâce à cela, car il ne s’agit plus seulement de narrer l’histoire, mais bien de la vivre aux côté de ce personnage central. Évidemment tout cela nous ramène irrévocablement à la célèbre citation « On ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux. ».
Visuellement le film n’a pas à rougir de ses concurrents, si en cette année 2015 les mastodontes Disney et Pixar ont su nous proposer une nouvelle fois des films très riches en terme de détails, Mark Osborne prend le risque de jongler avec deux techniques d’animations. Une plus traditionnelle et très organique pour raconter l’histoire du Prince, et une autre plus courante aujourd’hui en 3D mais qui ne manque pas non plus de charme.
L’animation ici possède une place aussi capitale que le récit, elle est la jonction parfaite entre les deux principaux niveaux de lectures que propose le film. Celui qui s’adresse aux plus petits avec son lot de gags et de situations légères, et l’autre niveau plus poétique, plus dense et totalement magnifique. Nous n’avons que rarement l’occasion de ressentir des choses grâce au visuel dans les films d’animations, et ce que propose Le Petit Prince est à mon humble avis le meilleur choix qui pouvait être fait pour narrer cette histoire. Dire que ce qui se déroule devant nos yeux déclenche des réactions physiques et que l’on essuie parfois quelques larmes, n’est pas un euphémisme. La rencontre entre le Prince et le Renard est aussi touchante et bouleversante que dans le roman.
Bref, si Le Petit Prince n’avait été qu’une banale adaptation de l’oeuvre d’Antoine de Saint-Exupéry, il aurait sans doute été plus convenu. Mark Osborne a su saisir toute l’essence du roman pour faire ici un film singulier et captivant, où émotions et poésie se conjuguent en une merveilleuse et émouvante lecture.
Ma note : 9/10