Critique de « Pentagon Papers » par E-Stark
« D’avoir pris une telle décision, d’avoir risqué sa fortune et l’entreprise à laquelle elle a consacrée sa vie, je trouve ça vraiment courageux. »
Sarah Paulson – « Pentagon Papers » de Steven Spielberg (2018)
Steven Spielberg semble au fil du temps s’être mue en un cinéaste à la fois bien conscient de l’industrie dans laquelle il évolue, mais aussi bien évidemment soucieux du monde qui l’entoure. Pentagon Papers s’avère donc être une oeuvre aussi riche que subtile.
Alors qu’on l’attendait au tournant en 2018 avec son adaptation de Ready Player One, Steven Spielberg s’apprêtait également à rappeler à quel point il maîtrisait le thriller politique. Pentagon Papers a beau être en projet depuis de nombreuses années, il est une lettre ouverte et cinglante au gouvernement Trump et aux diverses polémiques actuelles sur lesquelles les médias font leur beurre. Qu’est-ce que c’était le journalisme avant la toute puissance d’internet et de la télévision ? La même chose qu’aujourd’hui, de l’investigation à la recherche de scoop mais à la différence près que ces derniers avaient une vrai utilité à être dévoilés.
Habilement le récit du film s’arque autour de l’affaire des documents volés au Pentagone, et la presse à scandale et people de l’époque. Que faut-il traiter ? Faut-il caresser les puissants dans le sens du poil ou bien jeter un pavé dans la marre et rappeler au peuple de conserver son esprit critique ? Pentagon Papers vise juste, il va à l’essentiel là où l’ensemble aurait pu être verbeux et pompeux. Spielberg en fait une fresque ludique et accessible sur le pouvoir, celui du gouvernement qui cache les infos et celui de la presse qui tente de tout révéler. Deux entités s’affrontent dans un film à la fois fort, juste et touchant.
Au coeur de tout cela s’épanouissent Meryl Streep et Tom Hanks, deux figures fortes du cinéma Américain qui promettaient quelques belles scènes de dialogues sous la houlette d’un Spielberg qui saurait de toute façon comment les diriger. Si le film en lui-même est déjà passionnant, il faut bien avouer que le duo d’acteurs est une valeur ajoutée indéniable, la cerise sur le gâteau comme on dit. Streep compose avec un personnage à la fois différents de ce qu’elle a pu jouer dans des rôles similaires comme La Dame de Fer par exemple. Ici elle s’avère juste mais surtout touchante dans ce personnage de veuve sur qui échoue la direction d’un quotidien encore en quête de renommée, nous rappelant par la même occasion que Spielberg sait mettre en scène des héroïnes, très rares cela dit. Ici c’est une figure féministe avant l’heure et qui en l’espace de quelques scènes demeure plus pertinente que la plupart des pseudo-militante actuelles, loin de toute hystérie.
Tom Hanks lui est un personnage différent, très à l’aise dans ce registre l’acteur s’amuse et parvient à nouveau à réinventer son jeu à travers ce rédacteur sans cesse en mouvement. On peut dire sans trop s’avancer que contre toute attente il s’agit-là d’un des rôles les plus complexes de Tom Hanks, à l’instar d’un Forrest Gump d’Il faut sauver le soldat Ryan ou de La Ligne Verte, pour ne citer qu’eux bien entendu. Spielberg nous offre ici les deux meilleures prestations de l’année.
Pour finir et conclure cette critique, on oublie pas John Williams qui signe ici une bande-originale reconnaissable et pourtant surprenante. Pentagon Papers s’en sort admirablement, un excellent film captivant et juste. Spielberg à son meilleur et c’est comme cela qu’on l’aime.
Ma note : 9/10