Critique de « Ready Player One » par Axel
Avertissement: Cette critique contient des spoilers sur le déroulement de l’intrigue.
Parmi les adaptations les plus anticipés de ces dernières années Ready Player One faisait sans aucun doute parti du haut de la liste, celui-ci est devenu un véritable phénomène littéraire depuis sa parution en 2011 aux Etats-Unis dans la sphère « geek ». L’annonce de Spielberg pour la réalisation de l’adaptation cinématographique a été accueillie avec enthousiasme par la plupart des lecteurs du roman, heureux de le voir adapter par un réalisateur qui n’a plus rien à prouver en termes de réalisation de films de science fictions, bien que son dernier ait déjà 13 ans puisqu’il s’agissait de La Guerre des Mondes.
Néanmoins le pari était risqué à plusieurs égards car le livre empruntait énormément de références à la Pop culture des années 70-80 ce qui apporterait des problèmes de droits que le livre pouvait éviter car il ne s’agissait que de mots contrairement à des images et sons protégés par des copyrights appartenant à plusieurs sociétés et ayants des droits différents que ce soit dans les domaines du jeu vidéo, du cinéma ou de la musique. Ensuite la plupart de l’histoire du livre se passait dans un monde virtuel appelé l’OASIS dans lequel vont se réfugier les humains de 2044 pour oublier les problèmes économiques et écologiques du monde réel, ce qu’il fallait rendre attrayant visuellement pour que le spectateur ne s’ennuie pas dans ce monde virtuel qui se trouve déjà à l’intérieur d’un monde fictif.
En résumé la route s’annonçait pavée d’embuches diverses et variées pour que l’adaptation plaise au fan du livre tout en étant compréhensible et appréciable pour un grand public plus néophyte et n’ayant pas forcément tous les codes de cette culture « geek », est-ce que ce pari est réussi ?
Disons que oui et en même temps non, cet état non binaire constant vient du fait que chaque aspect du film a ses bons côtés et ses moins bons qui se battent constamment à l’écran pour rendre un résultat final bon mais qui se retrouve entaché par quelques aspérités dont il n’arrive pas à se détacher.
Ces problèmes sont vraiment apparents avec le scénario, bien qu’il s’agisse de l’auteur lui-même qui s’est occupé de l’adaptation de son roman avec l’aide de Zak Penn qui a entre autres signé les scénarios de X-Men 2 et Avengers mais qui a aussi commit (et le mot est choisi avec justesse) Elektra ou encore Inspecteur Gadget. Le souci principal du scénario est l’utilisation, que l’on pourrait qualifier assez justement d’abusive, de références à la pop-culture sans que cela ne soit justifié par quoi que ce soit et qui n’apporte rien au scénario, uniquement parce que les auteurs peuvent passer trente secondes à faire parler leurs personnages du vaisseaux Galactica, du Sulaco de Aliens ou encore des films de John Hughes ne veux pas dire qu’ils doivent le faire juste pour faire durer le film plus longtemps et ne rien amener de concret au développement de l’histoire ou des personnages, qui semblent citer des références pour cacher le fait qu’ils n’ont pas de personnalités très développés.
Les références ne sont pas inhéremment une mauvaise chose lorsqu’elles sont bien utilisées et amenées, elles peuvent être pratique pour développer une histoire car elles permettent d’ancrer les personnages dans une certaine réalité que le spectateur pourra rapidement identifier et s’approprier comme dans Clerks de Kevin Smith ou avec des exemples plus récents comme Scott Pilgrim (ou tous les films d’Edgar Wright), Tomorrowland (qui possèdent de nombreuses similarités avec Ready Player One mais qui est beaucoup plus maîtrisé et subtil que ce dernier) ou encore Fanboys dont le scénario était signé, surprise, par Ernest Cline auteur de Ready Player One et qui était beaucoup plus modeste et subtil quant à l’utilisation de ses références. Ici elles sont balancées à la tête du spectateur pendant tout le film à un rythme assez insoutenable et qui semble extrêmement forcé à de nombreux moments.
La musique d’Alan Silvestri vient ajouter un point positif à l’ensemble de l’expérience que propose Ready Player One car, même si elle ne se trouve pas au niveau de son travail sur la saga Retours vers le Futur elle propose des thèmes assez reconnaissables et mémorables pour ne pas tous les oublier une fois sorti de la salle de cinéma. Ce qu’elle apporte surtout est un contraste très apprécié aux musiques des années 80 qui parsèment le film qui, même si elles sont appréciables en dehors de la diégèse, se retrouvent ici lancé de façon aléatoire et paraissent même à certains moments forcés ce qui ne donne pas une impression de cohésion avec l’œuvre à l’image d’un Gardiens de la Galaxie.
Steven Spielberg prouve encore une fois sa maîtrise technique avec ce film, bien que quelques points noirs viennent tout de même entacher le tableau qui auraient du être parfait d’après les standards auxquels il avait habitué le spectateur. Les scènes marquantes ne vous quitteront pas car elles sont imprégnées de la puissance d’évocation narratrice que Spielberg a développé durant toute sa carrière jusqu’à la maîtriser quasiment parfaitement. Parmi elles nous pouvons compter entre autres la première scène de course qui impressionne par ses mouvements de caméra complexes sans que le spectateur ne se sente jamais perdu face à ce qu’il se passe devant lui à la manière d’un Redline dans l’animation japonaise et la partie inspirée de Shining qui en plus d’être exaltante et totalement inattendue, contrairement au reste du film, est une prouesse technique qui impressionne à chaque instant.
Les effets spéciaux dans l’OASIS quant à eux, bien qu’ils puissent paraître très beaux à certains moments, durant d’autres instants le film semble déjà accuser d’un âge qu’il n’a même pas, cela est dû principalement au choix de la direction artistique semi réaliste, semi cartoonesque toujours le cul entre deux chaises et qui risque de faire vieillir le film à une vitesse avancée. De plus les joueurs de jeu vidéo pourront se retrouver assez frustrés de l’effet rendu par le film pendant quelques scènes « épiques » qui donne plus envie de jouer au jeu plutôt que de le regarder.
L’interprétation faites par les différents acteurs du film est dans l’ensemble assez correcte même s’il n’y a rien de remarquable ce n’est pas non plus extrêmement mauvais, vu que 80 % du film se passe dans un univers virtuel et bien qu’il y aient des ramifications dans la réalité pour les personnages, le spectateur ne passera jamais vraiment assez de temps avec eux pour s’attacher réellement et avoir de l’empathie pour les personnages principaux, surtout le personnage principal, Wade Watts interprété sans aucuns véritable charisme par un Tye Sheridan qui semble assez mou dans son jeu et qui n’arrive jamais à véritablement toucher le spectateur. Olivia Cooke qui interprète Samantha Cook est quant à elle la révélation du film qui fait paraître Tye Sheridan encore plus mauvais qu’il ne l’est vraiment par contraste, mais même les efforts qu’elle fait pour porter le film sur ses épaules ne suffiront pas à nous faire croire à l’histoire d’amour qui est très cliché et semble forcée.
La toute fin du film en surprendra plus d’un car en plus de sembler être une scène rajoutée au film à la dernière minute, la morale donnée par celle-ci détruit tout ce qui avait été construit durant le film, elle semble contraire à l’idéologie développée et paraît même très réactionnaire pour un film de Spielberg. Le spectateur aura mieux fait de quitter la salle 2 minutes avant la fin puisque le film semble se finir juste avant que l’on nous balance cette scène inutile et contre-productive.
Pour conclure, le film reste une œuvre à voir en priorité en salle de cinéma car le spectacle est vraiment assuré par un Steven Spielberg toujours en forme et même si le pari n’est pas tenu à 100 % et que le spectateur pourra s’ennuyer à certains moments dû à un rythme pas toujours bien tenu durant les 2h20 de film, il reste une expérience agréable à vivre au moins une fois.