Critique de « Le Loup de Wall Street » par E-Stark
« Je m’appelle Jordan Belfort. L’année de mes 26 ans, à la tête de ma propre firme de courtage, je me suis fait 49 millions de dollars, ce qui m’énerva vraiment car ça faisait à peine un million par semaine. »
Leonardo DiCaprio – « Le Loup de Wall Street » de Martin Scorsese (2013)
J’ai mit du temps à voir Le Loup de Wall Street, j’ai beau apprécier énormément Scorsese, lui devoir certains de mes plus beaux moments de cinéphilie compulsive, mais ce film ne m’intéressait pas du tout.
Sans grande surprise, je n’ai aimé qu’à moitié Le Loup de Wall Street. Si certains aspects purement « Scorsesiens » fonctionnent parfaitement et font plaisir à voir, d’autres s’avèrent très lourds.
Le Loup de Wall Street est un film obèse, gargantuesque et totalement barré, c’est de là qu’il tire sa force mais aussi ses faiblesses. A l’image de Martin Scorsese qui a toujours demeuré dans l’empathie envers ses personnages, le spectateur est amené à l’être pour Jordan Belfort, incarné par Leonardo DiCaprio. Sauf qu’ici ça ne fonctionne pas et pourtant c’est bien tenté, car on pourrait facilement accorder du crédit à ce personnage, le voir comme un imbécile plein de pouvoir et qui ne mesure pas ses actes, mais ce n’est pas le cas.
Certes Belfort est présenté comme un idiot plein de pognon, mais la narration du film assurée par le personnage lui-même, ne le pousse jamais à s’invectiver sur ses actes. Mais ce qui rendait beaux des films comme Les Affranchis ou Casino, c’était justement que ces anti-héros prenaient du recul sur leur situation, ici ce n’est pas le cas. C’est un parti prit bien entendu, mais il n’est pas très judicieux dans la mesure où tout le film est exacerbé, porté par une folie dévastatrice, celle de l’argent et de la drogue. Évidemment que c’est démentiel et que ça scotche au siège, mais moi ça m’ennuie de ne pas pouvoir me raccrocher à quelque chose de « normal » et de non corrompu même un tout petit élément, juste une bouée de sauvetage dans tout ce ras de marée. On nous parle de monstres et c’est parfois redondant.
Mais là encore si le film est répétitif c’est pour coller au personnage de Belfort, enfermé dans son monde en toc. Cela donne un rythme décousu au métrage, mais tout ceci est voulu. Cette exacerbation donnerait presque l’impression que Scorsese verse parfois dans sa propre caricature, et moi ça me gêne, ça me fait mal, je n’ai pas envie de voir Marty dans cette posture. Cela même si c’est pour pousser un coup de gueule au système, Hollywoodien et mondial.
C’est sûrement l’un des messages du film d’ailleurs, puisque la mise en scène use sans cesse du numérique et des CGI. Cette mise en scène énorme à l’image du film, c’est excellent et approprié, tout coule parfaitement, c’est très clair, Scorsese s’amuse, mais c’est un jeu dangereux car Le Loup de Wall Street peut tout autant s’apparenter à une grosse farce narcissique qu’à un grand film malade et habité. Malgré tout on peut noter que l’approche du sujet dans son ensemble fonctionne bien. On critique le capitalisme, cette société où tout se vend, même les corps. C’est sans concession, cru et frontal, comme il fallait que cela soit. Ce n’est pas le sujet le problème, c’est le manque de passion qu’on utilise pour le mettre en scène.
Quant au casting parlons-en, si DiCaprio est impeccable dans son rôle c’est malheureusement parfois au détriment des autres acteurs. La première partie du film est très appréciable car elle met justement plus en valeur les choses notamment Matthew McConaughey parfait en mentor courtier, décalé et lubrique.
Jonah Hill en revanche est insupportable, tout en mimique, lui aussi décalé et barré à l’image du film, mais pas très crédible pour autant. Il n’est pas transparent, mais il ne convainc pas. Quant à Margot Robbie, on pense évidemment à Sharon Stone dans Casino, et Scorsese nous rappelle ici qu’il n’aime pas vraiment filmer les femmes, du moins qu’il n’arrive pas à leur accorder de l’importance ce qui n’est pas pour autant une raison pour le traiter de misogyne, car non Le Loup de Wall Street ne fait pas l’éloge de le femme objet, bien au contraire il dénonce tout cela.
Le Loup de Wall Street est un film de producteur et ça se voit, Scorsese nous a habitué à bien mieux et ce film nous le rappelle sans cesse. Cependant ce retour aux sources de la part du patron fait tout de même plaisir à voir, certaines scènes valent le coup. Mais pour ma part si je reconnais parfaitement au film d’avoir des qualités certaines, il ne m’a vraiment pas emporté. Tant pis …
Ma note : 5/10
2 commentaires
atreyu
Ence qui me concerne, je n’ai pas du tout eu le meme ressenti que toi et je n’ai pas vu passer les trois heures du film ! Au-delà de la mise en scène de Scorsese, qui est magistrale, les points nois que tu soulèvent sur le scénario sont pour moi des qualités et jamais le perosnnage de Belfort, brillament interprété par Di Caprio ne m’a paru tel que tu le décrit. C’es tau contraire un perosnnage emblématique qui vit sa vie sous adrenaline et le film communique cette fougue, mais pas sur quelques scènes. « Le loup de Wall street » est donc ce que Scorsese sait faire de mieux dans son cinema, car j’estime que peu de realisateurs peuvent se targuer de pouvoir raconter des biopics de 3 heures, en les rendant aussi passionnants sur la thematique que celle d’un courtier en assurance qui gravit les échelons. Et meme si je reconnais que ce n’est pas son meilleur film, c’est un de ses meilleurs de toute evidence sur ce qui fait en majorité tout le talent de son cinéma. Rythme, mise en scène, personnages bien ecrits aux dialogues ciselés, rigueur d’un montage ultra fluide ou jamais je ne trouve ca ennuyant, c’est une une pièce maitresse de sa filmo qui m’a littéralement emballé de bout en bout. Apres on peut ne pas aimer biensur mais je dis que ce serait dommage de passer a coté pour les quelques défauts du film, car c’est un film a voir absolument pour tous les passionnés du 7eme art et pas seulement. Scorsese a ce jour, reste un génie du cinéma bien plus fort que n’importe quel réalisateur d’aujourd’hui. A plus de 70 ans faire un film d’une telle énergie comme ce « loup de Wall street » montre qu’il a encore des choses a raconter et qu’il sait conter de maniere virtuose. A contrario de toi, « Les affranchis » tu vois m’emballe beaucoup moins que celui ci. sur d’autres points que je trouve moins abouti au final que « le loup » par exemple mais apres il me faudrait des heures pour te detailler ce que je veux dire. Sinon, « Casino » et « Taxi driver » reste ses 2 chef d’oeuvres pour ma parti. Voila, apres avoir lu ton avis critique, je tenais a apporter un avis plus positif sur avant tout les immenses qualités plus que les quelques defauts que je considere mineurs sur ce dont tu parles.
Un film comme « le loup » reste majeur dans sa carrière tout de meme. a plus et au plaisir de debattre a nouveau E stark quelquesoit nos point de vue respectifs
E-Stark
Tout est affaire de ressenti visiblement. Je ne blâme pas le film de Scorsese, mais il m’emporte moins que les autres. D’ailleurs je ne me permet de remettre en cause le talent du réalisateur, j’évoque juste ce que j’ai éprouvé face au film. De toute évidence c’est trop déjanté pour moi, et autant sur une heure ça va, mais sur trois heures je ne peux pas.
Après je reconnais parfaitement au film d’avoir des qualités, elles ne correspondent tout simplement pas à ce que j’attendais de ce « Loup de Wall Street ». Quoi qu’il en soit, merci de ton commentaire, et au plaisir également 😉